Les ruptures de contrat annoncées par Lactalis secouent toute la filière
Lactalis veut réduire sa collecte de 450 Ml en cinq ans. Cela passera par la rupture de 294 contrats conventionnels et bio en 2026 et 2027 pour 160 Ml. Un mois après l’annonce, ce sont toujours le désarroi et la colère qui animent les producteurs concernés.
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L’émotion reste vive chez les livreurs de Lactalis. Fin septembre, le groupe a divulgué son plan de réduction de collecte. Il rompra le contrat de 270 élevages laitiers conventionnels en 2026 après un préavis d’un an et de 24 élevages bio en 2027 (préavis de deux ans) pour un total de 160 Ml. À ce volume, il faut ajouter celui des 28 producteurs bio bretons actuellement en échange de collecte. « Nous leur proposons soit une reconversion en filière conventionnelle pour les intégrer dans notre collecte, soit la résiliation de leur contrat », indique Fabien Choiseau, responsable « appros » France de Lactalis.
Descendre à 20 % de produits industriels
Cette réduction n’est pas une surprise. Le groupe lavallois veut abaisser la part des produits industriels à 20 % dans son mix-produit et en finir avec son taux de déclassement du lait bio à 50 %. Les organisations de producteurs attendaient depuis le Salon de l’agriculture d’en discuter les modalités. Il n’y a pas eu de négociations. « Le choc a été rude », confie Nicolas Mauffrey, vice-président de l’Association des producteurs de lait Lactalis Grand Est (Apllage), une des OP de l’association Unell.
Son Gaec fait partie des 148 structures conventionnelles de l’Est touchées. Les 122 autres sont dans les Pays de la Loire et en Vendée-Poitou. Dans ces deux régions, Lactalis coupe des branches. Le site de Xertigny (Vosges), qui concentre le lait, va être fermé. À Saint-Varent (Deux-Sèvres), le concentrateur sera arrêté. Les producteurs en échange de collecte trop éloignés des sites du géant mayennais vont être exclus de son approvisionnement national.
Un cabinet d’accompagnement
Fidèle à sa logique d’entreprise, Lactalis poursuit sa stratégie de périmètres optimisés autour de ses outils de transformation. Il le fait dans le respect des règles contractuelles. Il a également mis en relation les OP et le cabinet Triangle, connu pour son intervention dans le Sud-Ouest il y a deux ans auprès des ex-Danone de Villecomtal-sur-Arros (Gers). Financé par les OP, le bureau d’études recense actuellement les besoins des entreprises présentes dans les deux régions. Cela devrait conduire à un plan d’actions que l’Unell prévoit de présenter début novembre. « L’objectif est qu’une solution soit trouvée mi-janvier pour tous les producteurs », souligne Bruno Lancelot, président de l’Apllage. Croisons les doigts pour que la conjoncture laitière conventionnelle porteuse joue en leur faveur. Le marché bio français l’est moins, mais le préavis de deux ans des contrats donne plus de temps.
Dans les Pays de la Loire, la Laiterie Saint-Denis-de-L’Hôtel et Terrena ont déjà rencontré Triangle. Ils ont confirmé leur capacité à accueillir 40 Ml, respectivement à Cholet (Maine-et-Loire) et à Ancenis (Loire-Atlantique), par communiqué de presse. « Ils correspondent au plan de développement de 40 Ml pour le site d’Ancenis, lancé il y a deux ans. Un certain nombre de livreurs Lactalis touchés sont aussi des coopérateurs de Terrena », explique Christophe Miault, administrateur du groupe coopératif.
Les coops ne sont pas la roue de secours
Dans l’Est, logiquement, le regard des producteurs se tourne vers la coopérative vosgienne Ermitage et son prix du lait moyen à 519 €/1 000 l, selon notre observatoire. Mais, pour les coopératives, il n’est pas question d’être la roue de secours comme cela a été le cas dans le passé. Le mot d’ordre est la préservation de leur équation laitière. « Je suis sensible à la situation que traversent les producteurs. Mais Sodiaal n’est pas là pour régler les problèmes de compétitivité que semble avoir Lactalis », déclare Jean-Michel Javelle, son nouveau président.
Christophe Miault, lui, veut élargir le débat : « Ayons le courage d’entendre le message de Lactalis. Il juge qu’en France produire du lait pour les marchés internationaux volatils devient compliqué. Pourquoi n’est-on pas à l’aise avec des prix du lait qui fluctuent ? Les éleveurs français n’ont pas un problème de productivité, mais un problème de compétitivité fiscale, qui les empêche de s’adapter correctement à la conjoncture. Il faut vraiment s’attaquer à ce sujet. »
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